Marcel Kuntz, biologiste, directeur de recherche au CNRS dans le laboratoire de Physiologie Cellulaire Végétale et enseignant à l’Université Joseph Fourier de Grenoble. Il publie aujourd’hui « OGM, la question politique » aux Presses Universitaires de Grenoble, un livre qui fait étrangement écho à la nouvelle polémique sur le maïs transgénique Pioneer qui pourrait être prochainement autorisé en Europe.
Au lendemain du feu vert de l’UE pour la culture du maïs transgénique Pioneer TC 1507, les opposants aux OGM sont immédiatement montés au créneau pour faire barrage à l’autorisation de tout OGM en France. Le ministre de l’agriculture Stéphane Le Foll a même promis une loi pour interdire les maïs OGM. Comment réagissez-vous à cette levée de bouclier ?
Pour l’heure, sauf erreur, ce maïs n’est pas encore autorisé. C’est la Commission européenne qui décidera et il est tout à fait possible que cela traine encore pendant des années. Cette opposition est de nature politique et idéologique avec des arguments sur l’environnement et la santé qui n’ont rien de scientifiques, mais tiennent plutôt de la propagande.
Quel est l’intérêt du maïs transgénique Pioneer TC 1507 par rapport à un maïs traditionnel ?
C’est un cousin de celui qui est autorisé, le MON 810, avec un principe actif proche qui peut combattre un certain nombre de larves d’insectes ravageurs comme la pyrale. C’est un maïs protégé contre ces attaques et qui ne nécessite pas de travail de protection par les agriculteurs.
Ce maïs permet-il de réduire l’utilisation de produits chimiques ?
Oui pour les agriculteurs qui ont des problèmes avec ces insectes ravageurs. Pour les autres, ce maïs n’a évidemment aucun intérêt.
Représente-t-il le moindre danger pour la santé des animaux et de ceux qui les consomment ?
Non, aucun. Ce maïs est autorisé depuis 2001 aux Etats-Unis. Cela fait maintenant 13 ans qu’on tergiverse en Europe sur ce maïs. Encore une fois, c’est un problème politique.
En consomme-t-on en France sans le savoir ?
A ma connaissance, on ne le retrouve pas dans du maïs doux. La France importe peu de maïs car nous sommes autosuffisants. On peut en revanche en retrouver dans des produits transformés qui viennent des Etats-Unis.
Pouvez-vous expliquer le plus simplement possible en quoi consiste l’agriculture transgénique ?
Il y a surtout une agriculture de grandes cultures. Un maïs transgénique est un maïs auquel on a rajouté un caractère qui va lui permettre de mieux résister aux insectes, ou au manque d’eau, grâce par exemple à de plus grandes racines.
Soit le caractère utile existe déjà dans des maïs traditionnels, et on fait des croisements pour obtenir le maïs que l’on souhaite. Soit le caractère recherché n’existe pas dans le maïs, et la transgenèse permet de greffer directement ce gène dans le maïs. Ce gène peut venir de n’importe quel organisme pour faire produire à ce maïs une protéine nouvelle qui a une propriété herbicide ou insecticide par exemple.
Après près de 20 ans de culture OGM dans le monde, qu’est-ce que ce mode de culture a apporté aux agriculteurs notamment ?
Si ce type de culture est un succès dans certains pays, c’est que les agriculteurs lui trouvent certains atouts. Mais il n’y a encore assez peu de caractères apportés aux cultures. On pourrait faire bien plus. Jusqu’à maintenant, les OGM de soja, colza, ou de maïs permettent surtout aux agriculteurs de se débarrasser des mauvaises herbes plus facilement, en évitant les pertes de rendement et de lutter contre les insectes ravageurs.
Tout est positif dans la culture OGM ?
Ce n’est qu’un outil. Tout dépend de la façon dont on l’utilise. Il y a des pays qui ne sont clairement pas dans une démarche de précaution mais dans une voie productiviste comme l’Argentine par exemple. Mais ce sont des pays qui ont besoin de faire rentrer des devises.
Dans d’autres pays comme les Etats-Unis, cette culture est globalement positive pour l’environnement, d’utiliser par exemple ces maïs OGM, par rapport à ce qui se faisait avant. Mais c’est un outil, on peut l’utiliser en bien ou en mal. Comme un marteau, on peut enfoncer un clou mais aussi se taper sur le doigt.
Au-delà de la question politique ou sanitaire, est-ce que un maïs OGM est différent d’un maïs traditionnel en termes gustatif ?
Cela ne change rien pour le consommateur. A part le caractère greffé, le maïs génétiquement modifié a la même composition qu’un maïs classique. C’est d’ailleurs l’une des conditions de mise sur le marché qu’un OGM.
Quelles sont les pistes les plus prometteuses en matière d’OGM ?
Vu l’opposition politique à laquelle doivent faire face les OGM, il n’est pas du tout certain qu’il y ait beaucoup de nouveaux OGM sur le marché à l’avenir. L’Europe est en train d’exporter son opposition dans d’autres pays.
Ce qui est potentiellement faisable, c’est de disposer à l’avenir d’OGM qui favorisent une meilleure utilisation des nitrates, et donc d’en utiliser moins dans les champs. Il est également possible de développer des OGM plus tolérants à la sécheresse, même si le maïs ne poussera jamais dans le désert. Mais il pourra certainement pousser prochainement dans des situations de pénuries d’eau grâce à la transgenèse notamment même si ce n’est pas la seule technique qui peut y parvenir.
On parle aussi beaucoup du riz doré, enrichi en bêtacarotène, pour les pays qui souffrent de déficience en vitamine A. Les domaines du possible sont très larges même si encore une fois, l’opposition politique risque de freiner ces avancées.
Cette nouvelle levée de bouclier est-elle une parfaite illustration de ce que vous décrirez dans votre dernier livre ?
Les politiques interprètent des données scientifiques pour justifier leur opposition aux OGM. Mais leur rôle n’est pas d’interpréter la science. Je vous rappelle au passage qu’il existe une Haut Conseil des Biotechnologies qui est censé donner des avis scientifiques et prendre en charge l’évaluation des risques.
Mais au lieu de consulter ces experts, ce sont les politiques qui se permettent d’interpréter la science. C’est comme si moi en tant que scientifique, je me permettais de dire aux politiques ce qu’il faut faire.
La plupart des politiques évoquent des incertitudes ou encore bien sur le principe de précaution pour réclamer l’interdiction des OGM…
C’est faux et totalement inventé. Quand on veut tuer son chien, on l’accuse de la rage. Si le gouvernement veut interdire les OGM, il le fait, c’est un choix politique, ce n’est pas mon problème. Mais ce que je conteste, c’est qu’on détourne les conclusions scientifiques en les interprétant mal uniquement pour justifier ces décisions politiques.
C’est malhonnête de faire dire à la science ce qu’elle ne dit pas. C’est une dérive dangereuse car on pourrait se retrouver à l’inverse avec des décisions politiques qui pourraient autoriser un produit cette fois dangereux, en interprétant également mal les études scientifiques. Ce n’est pas acceptable.
Si le principe de précaution c’est détourner des résultats scientifiques pour faire peur et justifier des décisions politiques, c’est inquiétant.
Un débat sur les OGM est-il illusoire dans notre pays ? Où sont les scientifiques et les experts ?
Les OGM sont désormais au centre d’une querelle politique difficilement réconciliable. C’est bien normal qu’il y ait des différences de vues en démocratie. Mais il faut que les politiques assument leurs choix. Voulons-nous une agriculture compétitive qui va gagner des parts de marché à l’international, ou simplement une agriculture paysanne ? Il faut bien réfléchir à cette question.
Que veut dire produire autrement ? C’est un slogan, mais qu’est-ce qu’on met derrière ? Cela fait pas une politique et il va falloir sortir de l’ambiguïté et dire exactement ce qu’on veut faire car pour l’instant on est dans le flou avec des mots ronflants et médiatiques comme agroécologie.
Quelle est la position de la FNSEA qui est très discrète sur la question des OGM ?
Elle évite souvent de monter au front sur cette question. S’agissant du maïs Pioneer TC 1507, il intéresse finalement assez peu d’agriculteurs en France et il ne répond pas à une demande forte des agriculteurs français, d’où la discrétion de la FNSEA vis-à-vis de ce maïs.
Est-ce l’agriculture raisonnée est compatible avec la culture des OGM ?
Tout à fait. Le principe actif du maïs MON 810 est utilisé en agriculture biologique en épandage. L’insecte est tué par le même principe actif. Sur le plan purement technique, l’agriculteur biologique trouverait un intérêt à utiliser ce maïs, mais pour des raisons idéologiques, c’est impossible. Pourtant, il faut être logique et rationnel, un produit ne peut pas être toxique dans un cas et pas dans l’autre. Si c’est toxique, il faut aussi l’interdire en agriculture biologique.
Ca fait du bien d’entendre enfin des scientifiques sur les OGM. En France, on a peur de tout : OGM, gaz de schiste, ondes, vaccins, huile de palme 🙁
La meilleure façon de ne pas avoir peur c’est d’ignorer le danger. Les OGM perpétuent un modèle d’agriculture qui détruit l’environnement, fait baisser la qualité du produit, tout en générant des surcoûts. Une technologie qui n’apporte rien à la société, n’a aucun intérêt et ne constitue pas un progrès, les OGM actuel n’apportent rien, c’est la seule approche rationnelle.
« Oui pour les agriculteurs qui ont des problèmes
avec ces insectes ravageurs. Pour les autres, ce maïs n’a évidemment aucun
intérêt ».
Ceci entraine des questions. Quel pourcentage d’exploitations en
a besoin en France. Y a-t-il une carte épidémiologique des territoires
touchés ?
« Ce n’est qu’un outil. Tout dépend de la façon dont
on l’utilise ».
« Mais c’est un outil, on peut l’utiliser en bien ou
en mal. Comme un marteau, on peut enfoncer un clou mais aussi se taper sur le
doigt ».
Ces deux assertions ma paraissent bien peu scientifiques.
« C’est comme si moi en tant que scientifique, je me
permettais de dire aux politiques ce qu’il faut faire ».
« C’est malhonnête de faire dire à la science ce
qu’elle ne dit pas ».
C’est pourtant implicite. Vous avez une opinion. Elle influence
donc. Mais en quoi est elle plus ou moins respectable que celle d’autres
scientifiques ? N’y a-t-il pas des scientifiques opposés aux OGM ?
Cela fait du bien d’entendre des propos scientifiques sur les OGM. Marcel Kuntz a raison: il n’y a plus de débat scientifique sur les OGM ( Aucune preuve de nuisance d’un OGM autorisé pour la santé ou l’environnement n’a jamais été apportée mais seulement des nuisances environnementales constatées et dues à des mauvaises pratiques agricoles mais pas à l’ OGM). Mais il existe bien un débat politique et idéologique,…. m^me entre les chercheurs. Certains chercheurs sont pour une agriculture paysanne, non exportatrice et sont alors plutôt contre les OGM. D’autres chercheurs sont favorables à une agriculture compétitive sur les marchés mondiaux et alors ils sont rationellement favorables aux progrés de la génétique et donc aux biotechnologies végétales qui permettent notamment d’accélérer le retour sur investissement de la recherche. Il y a aussi un débat écologique: faut il diminuer progressivement la quantité de produits chimiques utilisés pour protéger les plantes afin de préserver l’environnement tout en préservant le potentiel productif ou préfère t’on l’arrêt total des produits chimiques en faisant une croix sur la productivité ?Dans le premier cas on sera favorable au génie génétique, dans le deuxième cas, on sera favorable a l’agriculture biologique. Pour répondre à Leon, il y a environ 15 % des surfaces de maïs françaises qui ont de gros problèmes de pyrale, en particulier dans le Sud Ouest.
Le débat est biaisé : le problème n’est pas manger ou non du maïs OGM.
Ce maïs sert à perpétuer la fuite en avant d’une agriculture industrielle de monoculture, sans respect des sols (imperméabilisation), des rotations de culture (qui règlent en grande partie le problème des insectes), des parcelles toujours plus vastes (pas de haies, d’arbres = pas de régulation naturelle des sécheresses et inondations). En fait, ce n’est pas le maïs OGM qui pose problème, c’est le modèle agricole qu’on nous impose.
et oui, c’est la fuite en avant.
Le milieu médical vient de découvrir que les virus sont quasi tolérant à la majorité des antibiotiques.
Le progrès? oui
La fuite en avant? non
On veut jouer aux apprentis sorciers. Pour l’heure il n’y a pas encore eu de catastrophe liée aux OGM car ils sont peu utilisés. Mais regardez avec le nucléaire.. accidents des centrales. On vient de s’apercevoir des émanations radioactives aux USA près des sites d’enfouissement ( Bures en France)
Je ne vois pas que l’homme est plus heureux (j’entends ce matin qu’une centaine de personnes les plus riches ont autant de richesse que les 3 ou 4 milliards les plus pauvres, et ces OGM (et le reste bien sur), ne sont pas là pour réduire les inégalités, comme ils veulent le laisser entendre, mais pour accroitre les richesses des plus riches.
Alors, il serait bon que ce Monsieur Marcel Kuntz nous liste son patrimoine, car un chercheur au CNRS ne doit guère rouler sur l’or.
Y’en a marre de tous ces gigolos qui veulent faire parler d’eux en allant à contre courant de la réalité.
Il y a une dizaine d’années, certains « scientifiques » se faisaient fort de démontrer l’inexistence du réchauffement climatique.
Maintenant, ce sont encore des guignols qui veulent nous faire croire que les OGM n’ont pas de répercussion sur la santé ou l’environnement
Messieurs et Mesdames les journalistes, vous êtes bien gentils, mais je pense qu’autant il est de votre métier de laisser s’exprimer les extrèmes politiques, car chacun est apte à discener le vrai du faux, autant il est de votre devoir de ne pas laisser de tribunes à ces extrèmistes payés par on ne sait qui, car il n’est pas possible de comprendre pourquoi ils mentent, sauf lorsqu’on est un biologiste, et dans ce cas on ne se pose pas la question, on voit de toute évidence que ce sont des affabulateurs.
Du grand n’importe quoi comme toujours chez les idéologues démunis d’argument. Les OGMs actuels n’offrent aucun avantage comparé à des techniques agricoles et agronomiques adaptées. Ils sont seulement la garanti de poursuivre l’absurdité de la monoculture, désastreuse sur le plan économique et environnemental. De l’aveu même de ceux qui les commercialisent, ils ne servent pas l’intérêt des agriculteurs ou du consommateur, mais celui des firmes agrochimiques. Vous pouvez donner votre avis en tant que scientifique sans objectivité, mais heureusement vous n’avez pas la légitimité sur le plan politique. Quand des idéologues dirigent le monde on sait très bien ou cela conduit.
L’agriculture de conservation, réduit l’usage des pesticides sans l’inderdire, c’est le compromis idéal entre la production biologique et l’agriculture intensive, prétendument moderne, telle la monoculture qui maximise les risques et la pression parasitaire, sans contreparie réelle. Si ce scientifique était compétent dans le domaine agronomique, il ne prétendrait pas que les OGM réduisent l’usage des pesticides, ils ont contribué a augmenté celui des herbicides.
« C’est comme si moi en tant que scientifique, je me permettais de dire aux politiques ce qu’il faut faire. »
Ce propos est insensé.. Cet « expert » n’est pas « scientifique non citoyen » au boulot et « citoyen non scientifique » à la maison.
Dans les deux situations il a le devoir éthique de s’informer et de se contreinformer en se méfiant de la tentation de défendre avant tout son portefeuille et/ou son image et/ou son pouvoir.
S’exprime-t-il ici librement ?
Qui met-il derrière le terme « les politiques » ? «
Gilook, vous ne parlez pas en connaissance de cause, les OGM ne permettent pas de réduire les pesticides, la plupart d’entre eux sont tolérants aux herbicides, dans les pays émergents, ils ont au contraire contribué à leur usage, quant aux économies supposées d’insecticide, en France ils ne représentent que 5 % de la consommation globale. Aucun OGM actuellement commercialisé ne correspond à la notion de progrès, pas de gain de productivité, ni de qualité.
Votre vision de l’agriculture Française et de son potentiel est réducteur, de nombreux pays aussi performant utilisent jusqu’à 3 fois moins de pesticides par hectare. L’agriculture de conservation, permet de maintenir les rendements, voir de les augmenter en condition difficile, en réduisant pesticides et engrais chimiques, avec une qualité de produit supérieure et moins de résidus de pesticides. Les agriculteurs et les consommateurs n’ont pas vocations à financer la recherche privée.